En 1866, un éminent médecin anatomiste et anthropologue français du nom de Paul Broca décrivait une tumeur qui touche les dents. Il l’appelait « odontome ». Il s’agit d’une tumeur formée entièrement par des tissus dentaires.
L’odontome est une tumeur non cancéreuse même si un risque d’évolution vers le cancer n’est pas entièrement exclu. Cliniquement, comme toute tumeur, l’odontome évolue insidieusement. Il est souvent découvert fortuitement lors d’un examen radiologique ou à un stade assez avancé de la maladie.
Découvrez dans cet article un bref rappel sur les tissus dentaires et une description de l’odontome. Vous verrez également les symptômes et les moyens de diagnostic de cette pathologie tumorale, sans oublier le traitement et la suite thérapeutique !
Rappels anatomiques sur les tissus d’une dent
Les tissus présents dans une dent sont :
- l’émail : C’est tout simplement le tissu le plus minéralisé de l’organisme, il recouvre les couronnes dentaires ;
- la dentine : C’est un tissu dur qui recouvre l’émail et entoure la pulpe dentaire.
- la pulpe: C’est un tissu mou qui se trouve au cœur de la dent. Elle contient des tissus nerveux et des vaisseaux sanguins ;
- le cément: C’est un tissu minéralisé dépourvu de vaisseau et de nerf. Il recouvre la dentine au niveau de la racine de la dent ;
- le ligament alvéolo-dentaire: C’est un tissu conjonctif composé de fibres. Il permet l’ancrage de la dent au cément et à la paroi de l’os alvéolaire ;
- le parodonte: C’est l’ensemble des tissus de soutien de la dent comprenant la gencive, le cément et le ligament alvéolo-dentaire.
Odontome : la plus répandue des tumeurs d’origine dentaire
Qu’est-ce qu’on entend par odontome ?
L’odontome, aussi appelé « dentome », est une des tumeurs épithéliales odontologiques. D’ailleurs, c’est la plus répandue. Il s’agit d’une tumeur bénigne qui vient du développement anormal de tissus dentaires sains.
L’odontome concerne tous les tissus de la dent, particulièrement les tissus mous. Son développement ressemble à l’éruption d’une dent surnuméraire.
La tumeur évolue lentement. Arrivée à maturité, comme toutes les dents, elle arrête de se développer. Ce qui explique la bénignité de l’odontome.
L’odontome peut frapper à tout âge. Il apparaît souvent avant l’âge de 20 ans et préférentiellement chez les adolescent(e)s de 14 ans.
La plupart du temps, la tumeur siège au niveau de la canine supérieure ou inférieure. Elle lui arrive rarement de se trouver dans la région prémolaire.
Odontome : plusieurs types
Un odontome peut être :
- simple, c’est-à-dire une dent ;
- complexe où il y a un assemblage irrégulier d’émail et de la dentine sur des dents minuscules ;
- composé : quand il y a plusieurs dents difformes.
Dans ce dernier cas, le record est attribué à un enfant indien âgé de 7 ans. Il avait un odontome composé de 526 dents selon les informations du journal Le Monde
radiographie du record d’odontome composé
Par ailleurs, selon l’élément touché, trois types d’odontome existent. Ce sont :
- odontome radiculaire (qui se trouve au niveau de la racine) ;
- odontome coronaire (quand la tumeur concerne la couronne) ;
- odontome interdentaire (un développement tumoral à l’intérieur même de la dent).
D’où vient l’odontome ?
Les causes de l’odontome sont inconnues pour le moment. Toutefois, les scientifiques s’accordent à dire qu’un ancien traumatisme pourrait être un facteur favorisant son apparition.
Le traumatisme aurait perturbé l’évolution d’une dent au point que celle-ci se développe anormalement.
Les symptômes d’un odontome
Il n’y a pas de symptôme spécifique associé à l’odontome. Son évolution se fait sans douleur.
Toutefois, certains signes peuvent alerter le patient comme :
- une tuméfaction au niveau de la mâchoire ;
- un espace dentaire.
En effet, un kyste peut se développer autour de la tumeur pouvant entraîner une tuméfaction plus ou moins énorme. De plus, la tumeur peut empêcher l’éruption d’une dent normale ou déplacer les dents environnantes.
Les moyens de diagnostic
Quand le dentiste soupçonne la présence d’une tumeur odontologique, il commence par faire une radiographie. Si besoin, il pourrait demander un scanner. Toutefois, c’est l’examen histologique (observation des tissus au microscope) qui confirme le diagnostic d’odontome.
Radiographie panoramique
C’est la radiographie de première intention. Le cliché obtenu représente la mâchoire entière. Le dentiste peut déceler la présence d’une calcification. Ceci étant, une calcification n’est pas forcément synonyme d’une tumeur dentaire. D’où un examen plus poussé pour pouvoir déceler un odontome, notamment en cas d’un odontome complexe.
Radiographie rétro-alvéolaire
C’est une petite radiographie qui permet de visualiser une région précise de la mâchoire. Elle permet d’observer 3 dents au maximum. Ce qui est pratique pour étudier de plus près une dent suspectée de tumeur.
Mordu occlusal
Un film radiographique est introduit dans la bouche et maintenu par les mâchoires fermées. Le cliché dentaire obtenu correspond à l’empreinte des deux arcades en position de serrage. L’intérêt du mordu occlusal, en cas de soupçon de dentome, c’est entre autres de constater les dégâts occasionnés par la présence d’un kyste.
Tomodensitométrie (TDM) ou scanner
C’est un examen complémentaire de dernière intention. Il est davantage utilisé pour examiner les rapports d’étendue de la tumeur. Néanmoins, la TDM n’est pas indispensable au diagnostic.
Histologie
L’examen histologique (au microscope) montre une forme de tumeur en sac épithélial. Les différents tissus de la dent y sont observés.
Odontome : une indication chirurgicale
Le traitement est exclusivement chirurgical. Même si la tumeur est bénigne, il est indiqué de faire une ablation complète, quel que soit le type d’odontome et l’âge du patient. Ainsi, le chirurgien-dentiste enlève tous les éléments qui composent la tumeur.
Par la suite, il procède au curage de la paroi de l’odontome. Cela se solde par une cavité qui se remplit d’une substance osseuse au fil du temps.
En cas de tumeurs massives, l’intervention d’un chirurgien maxillo-facial peut être nécessaire pour préserver la mâchoire. On parle alors de chirurgie en deux temps : maxillo-faciale et dentaire.
En outre, un odontome peut requérir l’accompagnement d’un psychologue. Avoir une tumeur – même bénigne -, peut atteindre le moral. D’autant plus que s’il y a une tuméfaction de la mâchoire, cela peut nuire à l’estime de soi.
Quid de l’évolution de la maladie ?
Dans des cas rares (4%), l’odontome peut évoluer en malignité (cancer). D’où l’importance de procéder à une ablation complète de la tumeur.
Par ailleurs, si l’opération chirurgicale est bien exécutée, le pronostic est bon. Il n’y a pas de risque de récidive de la tumeur.
Pour ce qui est de la prévention, une visite régulière chez le dentiste constitue le meilleur moyen de détecter à temps cette pathologie. Cela est particulièrement important en cas d’antécédent de traumatisme.
Références
Hyperdontie : zoom sur les dents surnuméraires
Odontome
https://www.lemonde.fr/blog/realitesbiomedicales/tag/odontome-complexe/
https://www.jomos.org/articles/mbcb/pdf/2011/04/mbcb110039.pdf